lundi 10 janvier 2011

Cette mélodie mélancolique qui vient de la Havane contient des ondes maléfiques aux allures de Gitane.

J'entreprends un récit de voyage conséquent: aurais-je le talent et l'art pour sumer en quelques lignes une semaine magnifique à Cuba? Ce n'est pas New York, et la culture américaine vue et revue. Ce n'est pas Montréal, où je me sens chez moi plus qu'autre chose. Ca ressemble à ce voyage en Inde, il y a moins d'un an. Autres modes de vie, autre culture, et pourtant pas si loin que ça. Je décide donc de diviser mon récit en trois articles, qui correspondent aux trois grandes villes et régions découvertes en une semaine. Parce que nous avons cavalé, à coups de bus et de marche! Entre notre arrivée à La Havane le 30 Décembre et notre départ de la même ville le 6 Janvier, une année nouvelle, de belles expériences, des étoiles plein les yeux. Parlons donc de La Havane, d'abord. Point d'arrivée, point de chute, point d'entrée sur le territoire cubain. On a tout dit sur La Havane, ses ghettos, son insécurité, ses maisons délabrées attaquées par le vent et le sel marin. De quoi lui rendre justice!

Nous n'aurons que peu l'occasion de la découvrir, cette Ville aux Mille Colonnes. Le 31 Décembre, dernier jour de 2010, nous nous y consacrons le plus possible. Avec Catherine, Eléonore et Aurélie, mes aventurières, nous avons réservé au préalable deux chambres dans une casa particular, dans le Vedado, quartier résidentiel moderne de la capitale cubaine. Les casas particulares, ce sont ces particuliers, ces gens comme nous, qui mettent à contribution deux de leurs chambres. Une fois l'autorisation du régime cubain, qui contrôle vraiment tout (dictature communiste oblige), ces couples généralement accueillent les étrangers, offrent un lit, des repas et des déjeuners, en contrepartie d'un peu d'argent. Soumises à de lourdes contraintes, les casas particulares ont du mal à tenir: les propriétaires doivent verser chaque mois, touristes ou non chez eux, 200 CUC (pesos cubains convertibles, j'y reviendrai) à l'Etat. Néanmoins, c'est la meilleure place où loger, dixit les nombreux guides touristiques: moins dispendieux, et surtout permettant une réelle proximité avec la population cubaine. Notre premier hôte (que nous ne verrons jamais!) est Eleina. En réalité, ce n'était pas une casa particular, plus une maison d'hôtes-hotel. Nous connaitrons par la suite un accueil plus chaleureux et plus intime.

Le 31 donc, après une bonne nuit à la Casa Colonial Elaina, nous voici en route pour notre visite de la ville. Du Vedado à la Vieja Habana, quartier historique classé à l'UNESCO, 5 bons kilomètres, que nous entreprenons de faire à pied, en longeant la mer le long du Malecòn. Le Malecòn, c'est cette promenade aménagé ele long des côtes, un véritable symbole pour chaque cubain qui, parait-il, aurait prêter serment de fidélité à la mer à cet endroit. Une belle légende, qui se vérifie par ce qu'on croise le long du Malecòn. Une homme jouant de la trompette. Un pêcheur. Surtout, une femme récitant des incantations pour la mer, une adepte de la santeria, religion afro-cubaine (qui s'inspire des religions tribales nigériennes importées par les esclaves, au temps du Commerce Triangulaire). Nous longeons le temps de quelques minutes des edifices gardées par la police cubaine. On nous demande d'avancer sans prendre de photos. A un moment, une grande estrade, avec des armatures en fer, et le fameux slogan de Fidel: "Patria o Muerte!". A l'insu des gardes, je capture habilement deux trois clichés de cette magnifique démonstration de la dictature communiste qui sévit toujours à Cuba (là encore, j'y reviendrai plus tard). Le véritable plaisir de cette promenade le long de la mer, ce sont les conditions climatiques: pour la première fois depuis 4 mois, nous sommes en T-shirt et panta-court. Le soleil chauffe, la crème solaire est dans le sac, nous sortons les lunettes de soleil. Et toutes les deux minutes, nous nous répetons la même phrase: nous sommes à Cuba!



Après cette longue balade sur le Malecòn, nous entrons dans le vif du sujet, et pénétrons avec curiosidans les rue de La Havane. A quelques pas des rues pavées et entretenues du Quartier Historique, Centro Habana, la vraie ville. Celle où les déchets ornent les trottoirs, où chacun vend ses fruits comme il peut. Aux fenêtres, le linge sèche en grande quantité, ça jase, et de toutes les maisons s'échappe de la musique. La salsa, forcément. Plusieurs fois, nous voyons des personnes sortir des casas avec des gateaux à la crème et au sucre: ce soir, c'est réunion de famille pour les Cubains. Pas de grosse fête, comme chez nous, pour le passage à la Nouvelle année. Et le 1er Janvier, on ne fêtera pas 2011, mais la Fête de la Révolution. Un autre temps, une autre ère. Nous nous enfonçons dans les ruelles de plus en plus étroites. Les façades décrépies rappellent qu'il y a encore 60 ans, La Havane était le "bordel des américains", où chaque citoyen des US pouvait se faire plaisir, dans une ville de la débauche et du sexe. Sur les route, pas de voitures modernes, mais de vieilles américaines, là encore sorties tout droit d'un film d'époque. Roses, bleues, de toutes les couleurs, nous nous extasions devant la palette colorée. Un décor de cinéma. Et tout ce monde qui brasse, qui crie en espagnol, ces hommes et ces femmes qui nous regardent avec connivence, nous souhaitent la bonne année, le bonjour, nous demandent d'où nous sommes. Seule Eléonore parle un peu espagnol, nous essayons de comprendre ce qu'on cherche à nous dire. On nous oriente, on nous informe.


Passé le Prado, une gr
ande rue, nous débouchons sur le Parque Central, avec sa statue de José Marti. Un révolutionnaire, comme de nombreuses personnalités cubaines. Ce fut le premier à lancer la possibilité d'une nation cubaine libre, au XIXème siècle. Ami de Victor Hugo, il est aujourd'hui, avec Che Guevara et Fidel Castro, l'homme le plus célébré dans le pays. Statues, représentations de toutes sortes, rues, José Marti est partout! Après le Parque Central, nous arrivons devant le théâtre de La Havane, très joli édifice, et le Capitolio. Réplique presque conforme du Capitole de Washington, construit lorsque Cuba était encore sous protectorat, il servit de chambre des députés sous Batista. Etrange, encore aujourd'hui il continue d'être là, ce batiment qui n'a rien à voir avec la culture et surtout la révolution cubaine....


Mais il commence à faire chaud, il est midi passé, et chacun de nous a faim. Le petit déjeuner du matin, fait d'oeufs et de fruits (un smoothie à la fraise et la papaye excellent!) est vite éliminé, à force de marcher et de s'extasier. Nous décidons de trouver un paladar (petit resto bon marché) dans Habana Vieja. Nous nous y rendons tranquillement, en faisant un détour par la Plaza de la Cathédrale San Cristobal, où les serveurs s'affairent. Ce soir-là, il y a spectacle, et on apprête des tables pour les quelques centaines de convives qui auront payé au préalable 120 CUC pour le diner et le show. La cathédrale est magnifique, et ce bougainvillier qui règne sur un des palais à côté enchante la place. Je tombe en amour, et demande aux filles d'y revenir quand nous serons de retour à La Havane, le dernier jour. Mais vite, quelques photos, quelques explications sur la Plaza, et nous fonçons près de l'Eglise San Francisco pour manger aux Jardins de l'Orient, un charmant paladar peu cher, où chacun déguste un poulet et un mojito (le premier d'une longue suite) pour seulement 4 CUC (4 piasses!).

L'après-midi, nous marchons dans Habana Vieja. Au passage, je caresse la barbe du Caballerò, à l'éffigie d'un homme fou qui erra pendant 50 ans dans les rues de La Havane, se proclamant comme le Cavalier de Paris. Véritable symbole de la ville, il est de coutume de caresser sa barbiche. Puis, la Place des Armes, la Calle Obispo, Plaza Vieja. Nos nez rougissent de plus en plus, dans le dos une légère sueur se fait sentir. Routard et Lonely Planet en main, on arpente les rues. Nous voulons une glace, impossible de trouver un petit glacier sympa. Alors on continue à avancer, sans trop savoir où on va. Se perdre, voilà une bonne idée. A la fin de journée, nous revoici sur le Malecòn, à faire le trajet retour jusqu'à la casa particular. Le soleil se couche, sur le quartier de Miramar au loin, et la mer est toujours aussi belle.


Le soir, nous retrouvons Anne-Sophie et Hélène, parties la même semaine que nous à Cuba, mais qui préfèrent rester sur la Havane, avec une excursion sur les plages paradisiaques de Varadero. Sur la Plaza Vieja, petit repas, accompagné de pina colada et de daiquiris. Avant minuit, nous entreprenons d'aller une ultime fois sur le Malecòn, avec une bière. Les filles, fatiguées, nous abandonnent, et nous nous retrouvons tous les quatre, la fine équipe. Une cerveza dans la main, il est minuit, on s'embrasse. Pas de grande fête, deux trois coups de canon seulement, on trinque, et on file, en taxi cette fois, chez nous. A une heure du matin, nous sommes tous couchés: il faut dire que le lendemain, nous prenons un bus pour Trinidad à 8 heures. Ca change des réveillons précédents: pendant quatre ans, j'ai fait la fête toute la nuit. Cette année, simplicité et exotisme, Cuba, tout simplement.

Nous reviendrons pour une nuit à La Havane le 3 Janvier au soir. Dormir dans la même maison qu'avant, pour repartir le lendemain à Vinales. Puis le dernier jour, retour dans la capitale cubaine. Suite à venir...

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